SPÉCIMEN

Lil Dicky : “Je vise une carrière à la Will Smith”

Avant, David Burd était créatif dans une agence de pub. Puis, en 2013, il a posté Ex-Boyfriend sur YouTube, un titre mêlant rap et humour sous le pseudo pas très vantard de Lil Dicky. Depuis, il remplit des salles de concert, fait des millions de vues sur Internet, enchaîne les featuring avec des gros noms du rap game. Et n’est jamais retourné au bureau. Rencontre.
Lil Dicky annonce la couleur.

Qu’est-ce que vous dites quand on vous demande ce que vous faites dans la vie ?

Je réponds juste que je suis un rappeur. Les réactions sont bonnes, généralement. Les gens sont assez surpris parce que je n’en ai pas vraiment l’air. Les filles sont assez intriguées mais pour être honnête, j’ai parfois du mal à convaincre certaines personnes. Du coup, je dois montrer des clips. Mais bon, j’essaie de ne pas trop le faire…

Comment réussir à écrire des morceaux drôles sans pour autant tomber dans la parodie facile ?

Il faut d’abord y consacrer beaucoup de temps et d’énergie, et le faire de la meilleure façon possible. Je plaisante sur plein de sujets mais je ne veux vraiment pas que l’on pense que je me fous de la gueule du rap. Si je veux écrire une chanson drôle, il y a deux choses fondamentales pour éviter la parodie : il faut que ce soit marrant et qu’il y ait une intégrité musicale.

Vous pourriez un jour sortir un album plus sérieux ?

Il y a déjà des titres dans mon album qui le sont. Mais faire un projet hypersérieux, ça voudrait dire que je suis déprimé et malheureux… Moi, j’aime faire marrer les gens donc du moment que j’y arrive… Je ne me vois pas faire un projet sérieux, surtout parce que je n’ai pas assez de matière pour ça.

On sent que vous avez énormément confiance en vous. Ça vient d’où ?

J’ai confiance en moi et j’ai de grandes ambitions, mais c’est fondé sur rien de concret. Je ne sais pas d’ou ça vient, c’est quelque chose de… logique. Avant, j’étais le mec marrant du lycée, puis de la fac, puis du bureau. Un peu comme des mecs comme Jonah Hill ou Seth Rogen, je pense. Et puis, depuis quand j’ai commencé dans le rap, ça a tellement bien marché… Mon tout premier concert a eu lieu à peine six mois après avoir mis ma musique en ligne. Et il y avait déjà 1 000 personnes à Philadelphie. C’est un peu chaud pour un baptême. J’étais rincé à la fin, j’avais mis beaucoup trop d’énergie dans la première chanson… 

Et puis vous voilà en tournée en Europe. C’est votre idée ou celle de votre équipe ?

Je ne sais pas vraiment, mais si ça tenait qu’à moi, je serais venu même plus tôt ! Ça va faire trois ans que je fais du rap, le concert de Londres était complet en un rien de temps. On a eu 1 000 personnes, le public connaissait toutes les paroles, etc. Pour être honnête, je suis pressé de me balader dans Paris parce que c’est la première fois que je viens en France. Je suis sorti quelques instants, tout le monde fumait et j’ai trouvé que les gens étaient bien habillés.

Et le hip-hop français, vous connaissez un peu ?

Rien du tout, à part… Tony Parker. Je l’adore, he’s the man. Pour moi, c’est le mec le plus cool au monde ! Il est très sous-estimé, il fait partie des plus grands et j’adore sa personnalité. Le fait que Gregg Popovich (le coach des San Antonio Spurs, ndlr) continue de lui gueuler dessus encore aujourd’hui est très significatif. Quelle autre superstar serait capable de supporter ça ? Et surtout, c’est un fan de rap.

OK… Mais vous l’avez déjà entendu à l’œuvre ?

Ouais, j’ai même vu ses clips. Bon, disons que je suis fan du joueur, pas du rappeur…

En parlant de dépassement de fonction, vous vous êtes retrouvé dans une pub pour un chiropracteur de Floride…

En fait, il y a quelques années, j’ai lancé une récolte de dons sur Kickstarter. Pour quinze dollars, tu avais un t-shirt, pour 25 un CD, etc. Enfin, pour 400 dollars, tu avais droit à une chanson personnalisée d’une minute ! Et ce chiropracteur a donné 400 dollars. Il a ensuite utilisé le morceau pour en faire une pub ! Je n’y apparais pas, mais pour un clip, j’aurais demandé plus que 400 dollars…

Quelles sont vos influences en comédie ?

Larry David, Louis C.K., évidemment, mais aussi Will Smith…

Will Smith !?

Alors lui, c’est ma définition du cool. Et puis il vient de Philadelphie, comme moi, il a commencé dans le rap, puis il a décroché sa propre sitcom et il est devenu une star de cinéma. C’est le genre de parcours dont j’ai envie, avec peut-être un peu plus de rap…

Pour avoir son parcours, il faudrait trouver votre Quincy Jones…

Exactement. On est d’ailleurs en train de bosser sur une série actuellement. Ça ressemble pas mal à Curb Your Enthusiasm, mais dans le monde du hip-hop. Je joue mon propre rôle, Dave, le mec derrière Lil Dicky. Je ne pense pas réaliser, je n’ai pas assez d’expérience pour ça. Même au niveau de l’écriture, ce n’est pas si évident. Quand j’ai commencé à écrire des chansons, j’ai mis environ deux ans avant de montrer le moindre truc à mes potes. Pour la télé, j’aimerais écrire avec quelqu’un d’autre, plus expérimenté.

Vous espérez le vendre à Netflix par exemple ?

Oui, à Netflix ou HBO. Là encore, c’est ambitieux… J’aime bien jurer donc c’est important d’avoir un espace de liberté. HBO c’est le top, mais bon, même si tu vends ton projet, rien ne garantit non plus qu’il passera à l’antenne. Netflix, c’est pas mal aussi. Par contre, si ça se fait, je n’aimerais pas qu’ils diffusent tous les épisodes en même temps. Franchement, ça me tuerait de voir tout le boulot qu’on ferait dilapider en un jour. J’ai vu l’intégralité de la série d’Aziz Ansari (Master of None, ndlr) sur Netflix en un seul jour, c’est naze. Et puis tu ne vas pas la regarder une seconde fois… Quand je regarde Girls, je sais que je vais en avoir pour quatre mois. Et j’attends un nouvel épisode chaque semaine ! Bref, j’adorerais avoir une série qui dure genre cinq saisons, puis jouer au cinéma. D’abord des comédies, puis des drames. Comme Will Smith, quoi.

À écouter : Lil Dicky, Professional Rapper (CMSN records / ADA / WARNER) est dispo sur iTunes http://smarturl.it/LilDickyiTunes

PROPOS RECUEILLIS PAR THOMAS PRICE