
Un an et demi. C’est le temps qu’a passé Alba*, 23 ans aujourd’hui, à scruter la localisation de son partenaire. Tous les deux étaient étudiants, tous les deux vivaient le coup de foudre. Cela avait lieu à Nice. “J’avais besoin d’être vraiment souvent avec lui, et quand on n’était pas ensemble, j’avais besoin de savoir ce qu’il faisait exactement, où, à quelle heure et avec qui”, dit-elle. Dès les premiers jours de leur relation, Alba propose donc à Léo* d’activer la fonction “Localiser” de leurs deux iPhone. Lui n’y voit aucun problème. “Au début, je ne la regardais jamais”, dit Alba. Mais les ennuis arrivent dès la fin de l’été, quand chacun reprend ses études de son côté. Alba entre en première année de licence d’anglais, Léo commence un BTS de management commercial opérationnel en alternance, qu’il abandonne rapidement. Il se remet alors à beaucoup sortir avec sa bande de copains, et désactive régulièrement sa géolocalisation. Alba se met, elle, à vérifier beaucoup plus souvent sa position sur la carte. “Environ trois fois par jour, je dirais.” Lui tente de répliquer en prenant des captures d’écran de sa position à elle, qui n’est pas toujours exactement au niveau de l’université où elle étudie, car l’application a une marge d’erreur. “Quand je rentrais de ma journée de travail, il me demandait des comptes pour savoir où j’étais exactement et ce que je faisais là.” Les besoins constants de contrôle et de justification durent toute l’année, l’ambiance se dégrade, jusqu’à un soir de l’été suivant où Léo assure à Alba qu’il est chez lui, ce qui n’est pas le cas. “Je suis carrément allée le pister dans Nice, je l’ai trouvé en boîte, je lui ai montré ses messages pour prouver qu’il mentait, et je suis rentrée chez moi tranquillement.” Fin de l’histoire. Mais des trajectoires comme celle d’Alba et de Léo, il s’en trouve de plus en plus.