Entretien

“C’est lorsqu’on habite dans la case que l’on sait où sont les fuites d’eau”

Plombé par son conflit avec Copé, débordé par Juppé sur sa gauche et Sarkozy sur sa droite, c’est peu dire que François Fillon attaque 2015 dans le dur. Mais l’ancien Premier ministre veut toujours croire à cette course de fond qu’il s’est promis de mener jusqu’en 2017. À la sortie du Salon de l’agriculture, il tombe la veste et laisse parler l’homme derrière l’habituel masque austère.
  • par Franck Annese, Vincent Berthe et Stéphane Régy
  • 35 min.
  • Interview
Illustration pour “C’est lorsqu’on habite dans la case que l’on sait où sont les fuites d’eau”
Renaud Bouchez pour Society

Il y a un peu plus de deux ans, vous étiez l’homme le plus populaire de la droite. Et puis en 2012, en six mois, vous avez tout perdu. Depuis que vous n’êtes plus à Matignon, c’est plus dur… C’est un peu plus compliqué que ça. Ma ‘popularité’ est restée élevée plus longtemps que vous ne le dites. Jusqu’au mois d’août 2013. L’effondrement qui suit, à l’automne, s’explique pour plusieurs raisons. Notamment un papier épouvantable de Valeurs actuelles où ils m’ont mis en scène avec une agressivité exagérée à l’égard de Sarkozy. Du jour au lendemain, les gens se sont dit: ‘Mais, qu’est-ce qui lui arrive? Il a été son Premier ministre pendant cinq ans et d’un coup, il le vomit?’ Et puis, évidemment, le facteur le plus important, ça a été la présidence de l’UMP. J’ai cru qu’on pouvait gagner à la loyale.

Vous pensiez sérieusement que la posture du type honnête suffirait? Et je continue à le penser. L’histoire est loin d’être terminée. Finalement, j’ai gagné, l’UMP a été obligée de changer ses statuts et les équipes qui se sont mal comportées ont dû quitter le parti (Jean-François Copé et ses amis, ndlr).

Copé vous a un peu entraîné dans sa chute… C’est vrai, sans doute. Je connaissais ma famille politique, je savais qu’il pouvait y avoir quelques fédérations un peu ‘caporalisées’, mais je ne pensais pas que ça aurait une telle influence sur le résultat final, j’avais une telle avance! Ensuite, la question s’est posée: est-ce qu’il fallait, à ce moment-là, rompre totalement avec l’UMP? J’avais créé un groupe puissant à l’Assemblée nationale, la majeure partie de mes amis m’auraient suivi. Mais, au dernier moment, nous avons renoncé à franchir le pas, au nom de l’unité de notre famille politique. Aujourd’hui, quand je vois la crise que traversent les deux grands partis politiques, je me dis que j’ai peut-être raté une occasion…

Illustration pour FRANCE2012-LEGISLATIVES-UMP
AFP / THOMAS SAMSON

Diriez-vous que vous avez manqué de courage? Non, car il était plus confortable pour moi de m’en aller que de rester. Honnêtement, les deux années qui viennent de s’écouler n’ont pas été agréables. Les agressions, les luttes de clans au sein de votre propre famille, c’est usant. Quitter le parti aurait été plus commode, mais je courais le risque d’être marginalisé. Et aussi celui de me retrouver accusé de la division et donc de l’échec de l’UMP. Beaucoup de gens me demandent pourquoi je ne suis pas parti de Matignon en 2010. C’est compliqué de répondre à cette question. Premièrement, parce que les relations n’étaient pas exactement celles que la presse décrivait. C’est un mélange de complicité et de différences. Sur beaucoup de sujets, je n’ai pas hésité, en réalité, à entamer un bras de fer avec le président de la République. Deuxièmement, j’étais extrêmement populaire au sein de ma majorité durant cinq ans. Il faut se rendre compte de ce que c’est. Vous avez un président de la République pas très populaire et vous, à l’Assemblée nationale, les gens se lèvent dans l’hémicycle à chaque fois que vous prenez la parole, c’est grisant. Vous vous dites: ‘Merde, je ne vais pas m’en aller! Pourquoi je m’en irais?’ Je ne saurai jamais si j’ai eu raison ou tort. À chaque fois, j’ai privilégié –mais c’est mon caractère, aussi– le compromis et la continuité. J’ai passé une grande partie de ma vie politique aux côtés d’un homme, Philippe Séguin, qui était toujours empêtré dans ce type de situations. Il vomissait son parti et tous ses dirigeants. Pourtant, il n’a jamais franchi le pas. Et pire que ça, le jour où il est devenu patron du parti, il a trouvé le moyen de démissionner.

“Aujourd’hui, quand je vois la crise que traversent les deux grands partis politiques, je me dis que j’ai peut-être raté une occasion de créer mon propre parti”

Society #1

Illustration pour Come to (Sugar) Daddy
Photos: Annie Tritt pour Society

Come to (Sugar) Daddy

Proxénète ou simple businessman? Brandon Wade est à la tête du site de rencontres le plus scandaleux du moment. Convaincu que le moyen le plus sûr de séduire est encore d’en avoir dans le portefeuille, il a créé en 2006 Seeking Arrangement, un site mettant en relation des hommes fortunés (sugar daddies) et des femmes démunies et souvent beaucoup plus jeunes (sugar babies). Ils sont aujourd’hui plus de deux millions à s’adonner à ces petits arrangements entre “amis”. Et Brandon a, enfin, une vie sexuelle épanouie.
Un téléphone affiche une application ressemblant à Tinder, avec deux flux sortant de l'écran : à gauche, une substance verte et visqueuse, et à droite, une multitude de cœurs roses.
Illustration: Kelsey Dake

Tinder Délice

Success story? Phénomène de société? Sitcom? Ou tout cela à la fois? Comme il y a eu Facebook, il y a désormais Tinder. Une petite start-up californienne fondée par de jeunes nerds ambitieux qui se targue d’avoir changé le jeu de la séduction au niveau mondial, et qui pèserait plusieurs milliards de dollars. Mais qui, comme toute saga, comporte aussi sa part d’ombre: cadavres dans le placard, guerres d’ego, couples qui se brisent. Enquête.
Illustration pour Business classe
Karwai Tang/WireImage

Business classe

C’était écrit. Raillée pour ses piètres talents de chanteuse, moquée pour ses extravagances vestimentaires, cantonnée dans un rôle de femme bafouée et de mère de famille nombreuse, Victoria Beckham devait finir en desperate housewife sous Tranxène. Mais elle a refusé ce rôle-là. En quelques années, l’Anglaise a monté une marque de mode qui cartonne. Elle a même été élue entrepreneur de l’année outre-Manche en 2014. La revanche est un plat qui se mange cold.
Une main tient une allumette allumée, et la fumée qui s'en échappe forme le visage d'une personne.
Illustration: Charlotte Delarue pour Society

L’art et le pyromane

En entrant dans une maison où il est venu voler de la viande pour nourrir sa famille, un homme se blesse. De peur que son sang ne révèle son ADN, il décide de mettre le feu. Manque de chance, il y a, dans cette demeure, un Braque et un Picasso, qui partent en fumée. L’homme écope de cinq ans de prison. Voilà comment l’histoire est contée en ce début d’année. C’était évidemment un peu plus compliqué… Enquête.
Illustration pour “Cela n’a pas besoin d’être propre”

“Cela n’a pas besoin d’être propre”

Incluses dans le dossier judiciaire, les conversations entre Dread Pirate Roberts et le “membre des Hell’s Angels” Redandwhite, retrouvées sur le PC de Ross Ulbricht, oscillent entre la négociation commerciale, le tutoriel d’utilisation de Tor et d’interminables palabres sur la façon de traiter les gêneurs. Dans cet extrait, DPR et R&W discutent du sort de FriendlyChemist, fournisseur d’un dealer de Silk Road qui fait chanter Ross et menace l’anonymat de milliers d’utilisateurs du site.

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