
Imaginez un vendredi soir de terrasses bondées, de pintes tièdes et de soleil qui décline lentement. À une table, une bande d’amis, yeux plissés, gestes millimétrés. L’atmosphère est détendue, les rires fusent, mais en réalité, une tension presque imperceptible est en train de s’installer. Sur la table, un jeu de cartes colorées trône au milieu des verres. Les voilà qui glissent bientôt entre les mains, tandis que les stratégies se dessinent. Chaque coup, chaque carte laisse place à une moue agacée ou à un éclat de rire nerveux. Aucun doute n’est permis: ce qui se joue ici est une partie de Skyjo, le jeu de cartes qui s’infiltre dans les soirées entre amis, les repas de famille, les vacances et même les open spaces. Créé il y a dix ans par un Allemand du nom d’Alexander Bernhardt -inconnu au bataillon, pas même une fiche Wikipédia–, Skyjo a d’abord été autoédité, sans budget pub, sans le moindre plan marketing. Aujourd’hui, les chiffres donnent le tournis: dans un marché du jeu de société en pleine explosion en France -550 millions d’euros générés en 2023, soit +83% en dix ans–, il s’est vendu plus de trois millions de boîtes de Skyjo depuis 2019.