
Les services municipaux sont passés par là. Cette fois, non pas pour murer, mais pour nettoyer. À l’aide de balais et de pelles, ils ont tracé un parcours au milieu des détritus et de la poussière. Puis, ils ont délimité le tout avec de la rubalise. Dispositif sommaire mais à même de ne pas trahir l’esprit du lieu. Bienvenue au Mausolée, théâtre d’une des aventures les plus insolites du graff made in France. Et que, à partir d’octobre, l’on pourra enfin visiter, accompagné(e) d’un(e) guide et muni(e) d’une lampe de poche. Étrange destinée que celle de ce supermarché Casino désaffecté et longtemps squatté, situé Porte de la Villette, dans le XIXe arrondissement de Paris, pile en dessous du périph. En 2010, l’époque est sarkozyenne, les expulsions sont légion: quand le graffeur et amateur d’urbex Lek, qui a grandi dans le coin, pénètre dans l’ancien supermarché, qu’il fréquentait jadis avec sa mère, toxicomanes, prostituées et sans-papiers viennent tout juste de vider les lieux. “Le gros des squatteurs a probablement été viré du jour au lendemain, rembobine Lek. Les traces de vie étaient partout: habits, fauteuils éventrés, matelas, bagnoles cramées, mais aussi dessins d’enfants.” Et sur les murs, “tout était vierge, pas un tag, pas un graff”, complète Sowat, graffeur originaire de Marseille, que Lek a rencontré à cette époque. Près de 40 000 mètres carrés s’offrent ainsi soudain à eux: parking, piliers à perte de vue, rampes pour voitures, puits d’aération aux murs arrondis, tour dominant un immense toit-terrasse… “C’était unique”, s’enthousiasme encore Sowat.