
C’est l’histoire d’un livre qui devait sceller un passé et ouvrir une nouvelle voie. Une vie condensée en 364 pages, sous le titre Rødder, un mot danois signifiant “racine” mais également “jeune turbulent”, un peu comme si les deux étaient liés. Le 19 novembre dernier, Nedim Yasar, 31 ans, laissait au placard son habituel jogging et enfilait une chemise blanche pour présenter le récit de son ancienne vie de gangster lors d’une réception dans un quartier branché de Copenhague. Marie-Louise Toksvig, amie, collègue et plume de Nedim, avait fait le déplacement. Jakob Kvist, son éditeur, également. Certains compagnons de sa vie passée aussi. Ils étaient une petite cinquantaine devant l’estrade, où Nedim fit un discours ponctué de quelques blagues, comme il en avait l’habitude. Il fut acclamé par tout le monde. Quelques voix s’élevèrent ensuite pour le féliciter, puis la star de la soirée enlaça de ses bras démesurés ceux qui s’approchaient, avant de dédicacer son livre. De l’avis de tous, Nedim était heureux à ce moment-là. Plus tard, aux alentours de 19h30, quand tout le monde fut parti dîner ou boire un verre, Yasar ferma la porte des locaux, avant d’installer son corps massif au volant de sa voiture. À peine avait-il démarré qu’un homme vêtu de noir arriva sur sa gauche pour lui tirer deux balles dans la tête. Nedim décéda le lendemain matin. Il était de toute façon condamné. Rødder, ou l’histoire d’un livre qui devait sceller un passé, mais qui scella un avenir.