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Fin février 2016, dans un petit village à l’écart de Besançon, Monsieur et Madame L. organisent un dîner dans leur jolie maison. Il est investisseur, elle est cardiologue à Saint-Vincent, et trois couples d’amis sonnent à leur porte ce samedi soir. Parmi eux, Frédéric et Nathalie Péchier, ainsi que Catherine Nambot et Sylvain Serri, tous deux anesthésistes à Saint-Vincent. Ce n’est pas leur première soirée tous ensemble ; il y a notamment eu ce Nouvel An 2015, où Fred était arrivé avec une perruque, des lunettes en forme de cœur, et en avait fait des tonnes toute la soirée. À l’apéro, ce samedi de février 2016, Nathalie montre les photos des dernières vacances au ski. Elle parle toujours beaucoup, et aime bien critiquer l’organisation du service d’anesthésie à Saint-Vincent. Trop, selon Sylvain, qui a prévenu Catherine en amont: il lui rentrera dedans à la première remarque dans le genre. Les plats sont bien entamés quand Nathalie commence à raconter, pour la énième fois, son dernier accouchement en août 2005, quand Fred avait dû retourner en urgence à la clinique pour aider un collègue. Fred travaille trop, poursuit-elle sur sa lancée, car on l’appelle tout le temps à l’aide. Sylvain attrape la balle au bond: son mari est assez grand pour dire lui-même si quelque chose ne va pas, et d’ailleurs, plaisante-t-il à moitié, si Fred est si souvent à la clinique, c’est peut-être qu’il s’y sent mieux que chez lui. Plus tard, sur le trajet du retour vers Montfaucon, une engueulade éclate dans la voiture du couple Péchier. De nouveau, Nathalie pose un ultimatum à son mari: s’il ne lève pas le pied, elle demandera le divorce. Le lundi, à la demande de sa femme, l’anesthésiste écrit un e-mail à ses collègues pour les prier de ne plus faire appel à lui en cas de pépin quand il n’est pas de garde. Il dit aussi que ce n’est plus la peine de compter sur lui pour les tâches administratives. Ce faisant, il se prive de facto de la gestion de certaines réanimations. L’adrénaline ressentie, les vies sauvées in extremis, c’est pourtant ce qu’il préfère au travail. Pour Péchier, la personne responsable de cette situation n’est pas sa femme, mais son ami Sylvain Serri, à qui il reproche son intervention lors du dîner. “Tu as cassé mon jouet”, lui lance-t-il en le recroisant.
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