Enquête

Million Dollar Babies

Plus de deux tiers des Américains sont en faveur du droit à l'avortement. Pourtant, sa restriction est une des batailles annoncées du second mandat de Donald Trump. Et les opposants à l'IVG ne cessent d'engranger des victoires, à coups de millions de dollars, pas toujours très propres.
  • Par Brice Lambert et Mathilde Liotard
  • 13 min.
  • Enquête
Illustration pour Million Dollar Babies

La gueule de bois est sévère. En allant se coucher au soir du 5 novembre dernier, Adam Weiland, leader de Dakotans for Health, une organisation de défense des droits civiques dans le Dakota du Sud, espérait se réveiller le lendemain avec une démocrate à la Maison-Blanche et le retour du droit à l’avortement dans son État, où la loi est l’une des plus restrictives du pays -pas d’exception pour le viol ni pour l’inceste. Mais lorsque Adam a ouvert les yeux, Trump paradait et ses concitoyens avaient massivement rejeté le référendum pro-IVG qu’il avait initié avec Dakotans for Health, qu’il dirige avec son père et qui prévoyait de garantir un droit à l’IVG sans condition lors du premier trimestre de grossesse. Considérée comme modérée, voire pas assez exigeante par certaines organisations, dont le Planning familial, l’initiative a été rejetée par près de 59% des électeurs.
Une première aux États-Unis: jusqu’alors, partout où des référendums de ce genre avaient été organisés, le droit à l’avortement avait été rétabli. Adam Weiland et son père sont pourtant des vétérans de la politique. Le premier a été conseiller à Washington et notamment assistant du sénateur Barack Obama. Le second a dirigé plusieurs agences gouvernementales sous l’administration Clinton. “Nous sommes dans un État conservateur et très croyant, c’est vrai. Mais nous avons surtout perdu parce que le camp d’en face avait beaucoup plus d’argent que nous”, s’agace Adam. En tout, l’équipe de Dakotans for Health, composée en majorité de femmes bénévoles, a récolté 840 000 dollars, dont 500 000 versés par un gros donateur dans les toutes dernières semaines avant le scrutin. En face, le camp des antis -qui a refusé de répondre aux questions de Society-, disposait, lui, d’un budget d’1,7 million de dollars. Plus du double, dont la majorité a été récoltée via les organisations religieuses, en tête desquelles l’Église catholique, qui a donné 340 000 dollars. “C’était David contre Goliath, résume encore Adam. Ils ont pu payer des spots télé et radio des mois avant le scrutin. Nous n’avions tout simplement pas l’argent pour le faire!”

Profession: manifestant(e)

Society #247

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