
Vous écriviez récemment dans le New Yorker, à propos de la décision de la Cour suprême: ‘Ce n’est pas un retour en arrière, c’est pire.’ Pourquoi? Dans les manifestations, tout le monde crie: ‘On ne reviendra pas en arrière!’ Mais je pense qu’il y a une mauvaise compréhension de ce à quoi va ressembler notre quotidien. Avant Roe v. Wade, les femmes mouraient souvent d’avortements illégaux et dangereux. Aujourd’hui, les avortements illégaux seront beaucoup plus sûrs. Le danger, c’est la surveillance étatique. Nous faisons face à toute une panoplie d’outils permettant une criminalisation de l’avortement. Les femmes enceintes vont subir beaucoup plus de persécutions et d’intrusions des États, qu’elles veuillent avorter ou non. Une fausse couche pourrait aussi être considérée comme un crime, car certains États vont enquêter pour savoir s’il ne s’agissait pas d’avortements. La mère pourra alors être accusée de ‘mise en danger d’enfant’, ou ‘d’empoisonnement’. Cette décision va aussi faire de la fécondation in vitro une zone juridique grise. Et de même pour la pilule du lendemain: il y a une pharmacie au Kansas qui n’en vend déjà plus.