Numéro spécial élection américaine

“Il n’y a que deux types de héros: les rêveurs et les menteurs”

Rencontré lors du Festival Lumière, à Lyon, Quentin Tarantino a accepté de parler de la société américaine d'aujourd'hui, mais selon ses règles. En relisant cinq pépites d'une année clé selon lui, 1970, pour expliquer le mensonge, le racisme, la pornographie ou encore la vulgarité qui innervent son pays.
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  • Par Brieux Férot, à Lyon
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Une affiche de film vintage avec deux hommes en tenue de cow-boy, des scènes d'action et une bicyclette. Le texte mentionne "Butch & The Kid Are Back!" et les acteurs Paul Newman, Robert Redford, Katharine Ross, ainsi que le titre "Butch Cassidy and the Sundance Kid".

BUTCH CASSIDY ET LE KID de George Roy Hill

“Je n’ai pas vu le deuxième débat entre Trump et Clinton, assez violent paraît-il, mais c’est un bon point de départ. Dans Butch Cassidy et le Kid comme dans les autres films de George Roy Hill, il n’y a que deux types de héros: les rêveurs et les menteurs. Les rêveurs se battent pour que leurs rêves se réalisent, quand les menteurs se battent pour que leurs mensonges deviennent la réalité. L’autre point, c’est qu’aujourd’hui, on parle beaucoup d’évolutions technologiques comme d’une fin en soi. Or George Roy Hill, c’est l’inverse: il n’a pas poussé la technique per se parce que c’était un grand storyteller. Savoir raconter des histoires, c’est le fondement même de l’Amérique.”

Une affiche de film intitulée "The Liberation of L.B. Jones" réalisé par William Wyler, avec des slogans évoquant l'amitié interraciale et l'hospitalité du Sud.

ON N'ACHÈTE PAS LE SILENCE de William Wyler

“C’est le dernier film de William Wyler, qui n’arrive pas complètement à faire ce qu’il vise. Il y a une dimension très mélodramatique du Sud. Trop. Même l’histoire est inhabituelle: un type qui veut divorcer mais qui n’y arrive pas, tu ne sais pas trop où ça va. On peut débattre de la qualité du film mais il y a du lourd à la fin: une séquence où le meurtrier veut avouer et se confesser, mais toute sa ville ne souhaite pas qu’il le fasse. Ça, c’est fort, c’est même une question que je me pose souvent et qui parle de l’Amérique d’aujourd’hui: l’influence de ta communauté sur ton libre-arbitre. Dans le film, le personnage le plus violent a une crise de conscience après avoir commis un meurtre. Pour la première fois, par le meurtre, e vient un homme à ses yeux. Il n’était pas un homme, il le devient.
Quand tu reviens à cette période dans le Sud de l’Amérique, tu te demandes comment de telles situations de vie ont pu arriver. Qu’est-ce que les gens pensaient vraiment des actions du Ku Klux Klan? N’étaient-ils pas humains?
Quelles étaient leurs contradictions réelles, au quotidien, dans leur tête? Comme le disait Wyler, pour que l’inégalité corrigée par la loi soit vraiment effective, elle doit toucher les cœurs. C’est comme sur les chaînes d’info aujourd’hui, ces monstres que l’on voit, c’est intéressant de se dire qu’un drame peut les révéler à eux-mêmes. Je ne vois pas ce film comme moderne, il a toujours la perspective blanche du racisme noir dans le Sud, mais à cette période-là, il y avait une petite chance pour le cinéma noir de devenir mainstream.
Je ne parle pas de la blaxploitation, qui n’avait pas commencé, mais de films comme Le Propriétaire de Hal Hashby, écrit par Bill Gunn, qui était noir, ou Watermelon Man de Melvin Van Peebles. Deux films avec une conscience noire, une perspective noire.
D’autres films ensuite ont failli y arriver, mais parfois, il manquait une scène clé comme celle que je viens d’évoquer. Pour que la promesse du cinéma noir se réalise, il a fallu attendre Spike Lee.”

Society #43

Une personne à cheval se tient devant un groupe aligné de policiers en tenue anti-émeute dans un paysage désertique.
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« Nous devons couper la tête du serpent noir »

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Des hommes enveloppés dans des couvertures en Mylar dorment sur le sol et les bancs en béton. Un homme boit de l'eau directement d'un bidon, partagé par de nombreux détenus.
Dr

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