
Dans le monde pourtant futuriste de Megalopolis, votre personnage principal et son chauffeur roulent en Citroën DS de collection. Pourquoi cette dissonance? Parce que pour moi, la Citroën DS était un chef-d’œuvre de l’automobile. Charles de Gaulle a failli être assassiné dans cette voiture, et il s’en est sorti grâce à la suspension atypique de ce modèle. Il y a une espèce d’excentricité dans l’ingénierie française, quelque chose d’unique, comme l’ont montré André Citroën, Gustave Eiffel ou Marcel Bloch, que l’on connaît sous le nom de Marcel Dassault. Si je roulais en Citroën DS dans les rues de New York aujourd’hui, les gens se retourneraient sur mon passage et n’en croiraient pas leurs yeux, parce que c’est une vision du futur. Même chose pour le Concorde! Cette dichotomie entre passé et futur me fascine, car on sait que notre esprit interprète les signaux envoyés par les cinq sens de façon biaisée, inexacte. Il n’est conçu que pour nous aider à survivre. Tout est beaucoup plus confus, y compris le temps et l’espace, et il n’y a que les mathématiciens spécialisés en physique quantique qui peuvent avoir ne serait-ce qu’un aperçu de la réalité. Personne ne comprend comment ça marche. Enfin, à part Charlie Kaufman (scénariste de Dans la peau de John Malkovich, Eternal Sunshine of the Spotless Mind ou Synecdoche, New York, ndlr). Lui, il comprend.