
Tu es né à Vitry, mais rapidement, ton père a décidé de renvoyer toute la famille en Algérie, même si lui continuait de bosser en France. C’est ça? Exactement, il travaillait dans les travaux publics, ma mère s’occupait de nous. J’étais le dernier des cinq enfants. Mais quelques années plus tard, j’ai eu un accident, je me suis brûlé gravement avec, comment vous expliquer… C’est un four bizarre du bled, dans le sol en fait. Je jouais pas loin et j’ai mis la main dedans. Donc on est rentrés en France pour me soigner, j’avais peut-être 4 ans et pas conscience d’être né là. Et on n’est jamais repartis.
Raconte-nous le Vitry de ton enfance. C’est la vie en bas du bloc. C’est pas une période cool, les années 1980 dans les quartiers. Il y avait l’héroïne. On n’en parle pas beaucoup, mais c’était une hécatombe. Un matin en allant à l’école, j’ai vu un des anciens que je préférais allongé sur la pelouse, mort d’une overdose. On a vu plein de grands tomber. C’étaient les années sida aussi, plein de toxicos en sont morts derrière. Mais même si c’était une période dure, j’échangerais ma jeunesse pour rien au monde. Il y avait une solidarité comme j’ai rarement vu. C’était comme une grande famille.