Les pieds à terre | Society
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Les pieds à terre

Vous les connaissez: ils sont partis loin de la ville pendant le Covid, ont découvert les “territoires” en même temps que la “vraie vie” et, depuis, ils travaillent en partie de chez eux, d'où ils parlent sans cesse de leurs nombreux mètres carrés ou de leur jardin. Et ils squattent votre canapé dès qu'ils le peuvent.
  • Par Marc Hervez - Illustration: Jules Le Barazer
  • 12 min.
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Une femme portant un oreiller de voyage autour du cou et une couverture enroulée autour de sa taille entre dans une salle de réunion où deux personnes sont assises à une table, l'une avec un ordinateur portable et l'autre avec des graphiques.
Illustration : Jules Le Barazer

Il a la sensation de replonger dans ses “jeunes années étudiantes”, lorsqu’il avait effectué un séjour linguistique de huit mois en Australie ou qu’il était venu s’installer “en coloc place de la République”, à Paris, pour suivre un cursus au CELSA, célèbre école de communication. Sauf que François Coën a aujourd’hui 44 ans, et son colocataire -son associé- six de plus. Le communicant, qui a autrefois travaillé pour le compte de personnalités politiques (Michel Sapin, Muriel Pénicaud, Fleur Pellerin), vit bel et bien avec femme et enfants, mais seulement les trois quarts du temps. Début 2021, il lançait sa boîte de relations publiques. La même année, comme tous ceux pour qui les confinements successifs ont chamboulé la manière d’envisager l’existence, il a troqué la trépidante vie parisienne contre des mètres carrés supplémentaires et un bout de pelouse en province. Lui et sa famille ont déménagé à Amiens. Mais ses clients, eux, n’ont pas bougé, ce qui fait que le quadragénaire a besoin de passer une à deux nuits par semaine dans la capitale pour honorer des déjeuners ou traiter les affaires que le télétravail ne permet pas de gérer. “Amiens, ce n’est pas très loin de Paris. Je pourrais faire l’aller-retour dans la journée, mais le dernier train est à 22h26. Il y a un peu une dimension Cendrillon, illustre-t-il . Je préfère m’épargner le stress de me retrouver démuni si je venais à le rater.” Quant à son associé, même problématique: il habite en grande banlieue, et il lui arrive de caler des rendez-vous à l’aube ou tard le soir. Alors, avant que leur société emménage dans de nouveaux locaux qui disposeront d’un coin nuit adapté -leur gros projet d’ici quelques mois–, les deux dirigeants se partagent non seulement un fatbike électrique mais aussi et surtout un appartement, à deux pas de la gare du Nord. Quand les deux y sont le même soir, l’un prend la chambre, l’autre le salon. “Ça fait un peu bizarre de demander ’Tu as bien pensé à acheter du papier toilette?’ par message à son associé, s’amuse François Coën. On dit parfois que monter un business à deux, c’est comme se marier, mais je ne pensais pas que l’on irait jusqu’à vivre sous le même toit. Finalement, ça renforce notre relation.” Il faut dire que ce pied-à-terre de fortune est déjà un luxe. Les premiers mois qui suivirent son installation dans les Hauts-de-France, l’entrepreneur avait opté pour une solution encore plus archaïque: le bureau de quinze mètres carrés de sa start-up, où l’on trouvait un Clic-Clac (le premier meuble acheté) et un évier, mais pas de douche. “J’allais me laver au Keepcool (une enseigne de salles de sport, ndlr). Je m’y étais abonné essentiellement pour faire ma toilette, et j’allais éventuellement faire un peu de tapis de course à la franchise d’Amiens.”

Les amis et les belles-mères

Society #267

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