
Si la salle dans laquelle Gabriel Garcia patiente en cet après-midi d’été disposait d’une fenêtre, celle-ci donnerait sur un paysage de palmiers et de drapeaux américains. Le thermomètre géant planté à côté de la plage de Miami indique 35°C et des plaisanciers au torse luisant glissent en rollers le long des bâtiments Art déco qui bordent la côte. À l’intérieur, l’atmosphère est moins détendue. Assis dans les bureaux de son avocat, à Coral Gables, l’une des villes du comté de Miami-Dade, Gabriel Garcia, 40 ans, se tient le buste droit et la mine concentrée. Il porte sur le dos un t-shirt de la marque “patriotique” Grunt Style LLC, fondée par un vétéran californien. Les couleurs du drapeau des États-Unis apparaissent au milieu d’un symbole Superman, tandis que deux fusils s’entrecroisent sur les manches. Aux côtés de Garcia se tiennent une juriste et un homme muni d’une caméra, dont le rôle est d’enregistrer chacune de ses réponses. Gabriel Garcia ne fait nullement confiance aux médias, comme il l’a précisé quelques semaines plus tôt, dans les mêmes bureaux, aux reporters du journal local, le Miami Herald. Trois mois auparavant, des journalistes d’une chaîne de télé floridienne étaient venus frapper à sa porte, dans l’espoir d’obtenir une interview. Ils n’avaient trouvé à son domicile qu’un mot explicite: “Aucun commentaire. Merci de respecter la vie privée.” Qui dit méfiance dit aussi économie de salive et réponses parfois expéditives. Lorsqu’on l’interroge, le Floridien aime répéter le mot “correct”, tel un soldat au rapport. Sa famille vient-elle de Cuba? “Correct.” A-t-il servi au sein de l’armée américaine durant près de quinze ans? “Correct.” S’est-il rendu en Irak? “Correct.”