
Rafael Correa pénètre dans un amphithéâtre de l’université libre de Bruxelles sous les cris d’une foule déchaînée et d’un chauffeur de salle en chemise et chapeau de cow-boy blancs qui brame dans la sono pour annoncer “l’arrivée de l’homme qui a construit notre pays” ou du “meilleur président de l’histoire de l’Équateur”, ou encore du “commandant de nos cœurs et de la révolution”. Les bancs de l’université sont, en ce samedi de septembre 2018, occupés par une diaspora équatorienne venue d’Angleterre, de France, d’Allemagne ou d’Espagne. Dans les airs flottent des banderoles bleu et jaune.
Rafael Correa n’est plus le président de son pays depuis près d’un an et demi, mais dans son costume marine et avec sa carrure de boxeur de Guayaquil, il avance d’un pas monarchique. Des jeunes hommes et des vieilles femmes se jettent dans ses bras. “Il y aura du Rafael pour tout le monde”, promet le cow-boy au micro. Francisco, un Équatorien de Valence, clame au président, sans une virgule et sans respirer: “On a dépensé notre argent on n’a pas mangé depuis hier parce que vous nous avez rendu notre dignité on est fait d’un acier si fort que personne ne nous fera jamais tomber merci.” Viennent ensuite Milton et Monica, et Alex, et encore des vagues de fidèles qui dégringolent des escaliers pour prendre un selfie avec le président. “Sécurité, aidez-nous!” supplie le chauffeur de salle. Correa parvient enfin à s’asseoir au premier rang quand un chant descend des tribunes: “¡El pueblo, unido, jamas sera vencido!” (“Le peuple, uni, ne sera jamais vaincu!”)
Correa se met à nouveau debout et contemple l’amphithéâtre. Il lève le poing et se frappe le cœur.