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L’Indépendant

Sean Baker, le metteur en scène d’Anora, a remporté la dernière Palme d'or. Il réalise des films sur les marges de l'Amérique, avec des petits moyens et quelque chose à dire. Pas grand monde ne les voit, ou en tout cas pas assez à son goût. La marque d'un grand cinéaste?
  • Par David Alexander Cassan
  • 14 min.
  • Portrait
Illustration pour L’Indépendant
Photos: Aliocha Boi pour Society

25 mai 2024, Palais des festivals, Cannes. Sean Baker et l’équipe d’Anora font partie des fameux “rappelés”, revenus sur la Croisette pour assister au palmarès. S’ils sont assis dans les travées du Grand théâtre Lumière, en tenue de soirée, c’est parce qu’ils vont monter sur scène, à un moment, pour recevoir un prix. Karren Karagulian, acteur non professionnel d’une cinquantaine d’années, est apparu dans les huit films de Sean Baker, de l’an 2000 à aujourd’hui. Les cinq premiers ont été tournés avec des microbudgets, largement inférieurs au million de dollars. À la ville, Karagulian travaille dans un magasin de meubles. En smoking bleu nuit et nœud papillon, il est ce soir-là assis à la même rangée que Baker, cinq places sur sa gauche. “Il y avait six prix avant la Palme d’or, et à mesure qu’ils étaient attribués à d’autres que nous, mon cœur se serrait, se souvient-il. Quand la présidente du jury a dit ‘Anora!’, j’ai croisé le regard de Sean et j’ai bondi de mon siège: notre rêve le plus fou se réalisait.” Sean Baker monte sur scène, met un genou à terre devant George Lucas, qui lui tend la petite palme dorée dans sa boîte en feutre. “Que ce soit un de ses réalisateurs préférés qui lui remette la Palme d’or, continue Karagulian, c’était la cerise sur le gâteau. Je ne réalise toujours pas.”

Society #245

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