
Des chromatogrammes en colère, avec des pics signalant la présence d’une substance inconnue. Sarra Gaspard n’a jamais oublié le résultat de ces tests de potabilité de l’eau effectués par la Direction de la santé et du développement social (DSDS) en Guadeloupe. C’était en 2000, soit un an après son arrivée à l’université des Antilles, à Pointe-à-Pitre. “Après quelques mois, les agents de la DSDS ont réussi à déterminer ce qu’était cette molécule: le chlordécone”, raconte-t-elle aujourd’hui, dissimulée derrière les piles de documents qui trônent sur son bureau. Or à l’époque, la molécule en question, utilisée en tant que pesticide, était déjà interdite depuis sept ans dans les Antilles. Comment expliquer que l’on en retrouve, alors, toujours dans les sols? “Je n’avais pas encore conscience de l’ampleur du désastre, commente la scientifique de 54 ans. Mais à partir du moment où ils en ont trouvé dans toutes les rivières de Guadeloupe, je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose.” La question de la persistance de la molécule dans les sols antillais, et leur nécessaire dépollution, deviendra par la suite son objet d’étude principal.