Témoignages

48, rue de l'Oubli

Le 18 novembre 2015, les habitants du 48 rue de la République, à Saint-Denis, étaient réveillés en pleine nuit par l'assaut contre deux terroristes des attentats du 13-Novembre qui se cachaient dans leur immeuble. Pris pendant plus de sept heures entre les balles du RAID et les dégâts causés par le déclenchement de la ceinture explosive d'un des fugitifs, ces habitants souffrent encore, sept ans plus tard, de graves séquelles. Que la justice, qui ne leur a jusqu'ici pas accordé le statut de victimes, rechigne à reconnaître.Voici leur histoire.
  • Par Sophie Tardy-Joubert - Illustrations: Emmanuel Prost
  • 16 min.
  • Récit
Une illustration montre une rue avec des bâtiments, des personnes marchant, et des panneaux de signalisation. Un texte indique l'appartement où se cachaient certaines personnes.
Illustrations: Emmanuel Prost pour Society

Dans la grande salle en bois clair, ils se faufilent parmi la foule des parties civiles ; se serrent sur un banc. Ils s’installent toujours à la même place, au fond, près de la porte. Il y a là Halima, trentenaire, toujours souriante. Leandro, l’un des plus anciens de l’immeuble ; Mohammed, qui n’y a vécu que quelques jours. Depuis plusieurs mois, ils sont une petite dizaine à suivre en pointillé le procès du commando qui a changé leur vie, il y a bientôt sept ans. Tous ont l’air fatigué. Priscilla, parfois, essaye de se joindre à eux. Mais la plupart du temps, elle fait demi-tour avant d’arriver au palais de justice. Faire face aux accusés, prendre le métro: tout cela est encore trop éprouvant.

En novembre 2015, tous vivaient à Saint-Denis, à quelques rues de la basilique, en plein centre-ville. Leandro et Helena habitaient depuis quinze ans, avec leurs trois enfants, cette copropriété composée de trois bâtiments tournant autour d’une cour, à l’angle des rues du Corbillon et de la République. “Il y avait des Péruviens, des Serbes, des Chinois, des Marocains. On s’appelait d’une fenêtre à l’autre, on fêtait les anniversaires et Noël avec les voisins. Les enfants jouaient ensemble dans la cour”, se souvient Helena. Leandro travaillait comme maçon depuis l’âge de 20 ans. Elle, femme de ménage dans une école internationale, rêvait de faire une formation pour devenir coiffeuse. Les enfants grandissaient, la vie suivait son cours, sans beaucoup d’argent, mais sans trop de soucis non plus. Priscilla habitait à l’entresol, juste au-dessus du rez-de-chaussée, dans le petit appartement où elle avait elle-même grandi, avec son compagnon et ses deux filles de 4 et 6 ans. Elle travaillait comme aide-soignante dans une clinique à Asnières et étudiait pour devenir infirmière. Et en cette mi-novembre, comme beaucoup, elle n’était pas complètement tranquille: “Il y avait eu les attentats. On avait peur, on se disait que ça aurait pu arriver chez nous.”

Society #184

Un groupe de personnes est rassemblé devant Stonehenge. Une personne au centre est enveloppée dans une couverture blanche, tenant un petit objet dans ses mains. L'ambiance semble être celle d'un rassemblement ou d'un événement.
Photos: Theo McInnes pour Society

Complètement stone

Chaque 21 juin, dans le Sud-Ouest de l'Angleterre, des milliers de personnes s'amassent autour des pierres mégalithiques de STONEHENGE afin d'accueillir le jour le plus long de l'année.Depuis quelques années, le solstice d'été est aussi la démonstration d'un phénomène constant: les Britanniques seraient de plus en plus nombreux à embrasser druidisme, paganisme et folklore. Parce qu'il s'agit du meilleur remède à la crise identitaire que traverse le pays du Brexit?
Une scène colorée représentant un hôtel avec des personnes en uniforme vert, un ruban de sécurité, une voiture de police et des palmiers en arrière-plan. Le ciel est jaune avec un soleil brillant.
Illustrations: Simon Bailly pour Society

La chute

Le 2 juillet 2018, vers 4h30, Loïc Goudard, jeune agriculteur en formation originaire de l'Ain, chutait du septième étage d'un hôtel de Magaluf et décédait quelques heures plus tard. Suicide, comme l'a d'abord conclu la police espagnole? Ou énième accident, dans cette station balnéaire bon marché de l'île de Majorque tristement habituée à la pratique du balconing? Ni l'un ni l'autre, selon la famille, persuadée que Loïc était poursuivi. Et qui, quatre ans plus tard, bataille pour ne pas voir le dossier se refermer définitivement.

À lire aussi

Abonnez-vous à Society+ dès 4.90€

Des centaines de docus à streamer.
7 jours gratuits !