
Son désir d’enfant est né après une blessure à l’épaule droite. Pour Sarah*, cette articulation était jusque-là un outil, elle s’en servait des milliers de fois par jour dans le supermarché où elle travaillait comme responsable de magasin. En bonne manageuse dévouée et impliquée, voire “psychorigide sur les bords”, cette brune aux yeux verts aimait se rendre dans les rayons pour aider ses collègues à tirer des palettes et scanner des étiquettes. Ces gestes répétés ont provoqué des tendinites chroniques. Sarah s’est fait opérer en septembre 2021, le chirurgien lui a rafistolé le ligament et rogné un bout d’os. En juillet 2022, elle retrouvait son poste de travail avec, en guise d’accueil, une lettre de licenciement. Sa direction voit alors d’un mauvais œil son articulation défectueuse et anticipe une chute de sa productivité. Des collègues se sont ligués contre elle, agglomérant des micro-embrouilles qui ont fini par dessiner un motif de licenciement. Sarah conteste cette décision, elle attaque le supermarché aux prud’hommes et surtout, elle ouvre les yeux sur son existence. “Avant, ma vie, c’était boulot, boulot, boulot. Je pouvais faire 6h-18h si le magasin avait besoin. Je bossais le samedi et parfois dès 5h. Après mon opération, tout a changé.” Sarah renverse ses priorités et se fixe une nouvelle ligne de conduite: moins de travail et plus d’amour. Célibataire, elle se tourne d’abord vers la tendresse du monde animal en adoptant un chien, un berger australien, race réputée joueuse et affectueuse. La trentenaire choisit une femelle, qu’elle nomme Teka. Elle lui donne du “mon cœur”, “ma chérie” ou “mon bébé”. Puis elle réalise qu’il est l’heure de concrétiser son ambition ultime: devenir mère.
Le premier don est prévu un dimanche, à 18h. Mark s’y rend rasé, présentable, “comme [s’il allait] au boulot”, avec une petite boule au ventre quand même. “Il y a un truc illicite, un côté cache-cache”