
À l’été 2014, il y eut Eric Garner à New York et Michael Brown à Ferguson. En 2015, Freddie Gray à Baltimore. Le 5 juillet 2016, Alton Sterling à Baton Rouge, en Louisiane. Dès le lendemain, Philando Castile dans le Minnesota. Enfin, le 20 septembre dernier, à Charlotte, Keith Lamont Scott devenait le 173e homme noir à être abattu par la police américaine au cours de la seule année 2016. Parallèlement, au cœur de l’été, alors qu’il faisait 32 degrés sous le soleil de Washington, les gens s’amassaient devant l’Industrial Bank: ils ont été au total 1 500 à venir ouvrir un compte au siège de l’autoproclamée “plus grande et plus vieille banque noire du pays”, pour une valeur d’à peu près 2,7 millions de dollars.
À plus de 1 000 kilomètres de là, dans le quartier de Bronzeville, à Chicago, l’Illinois Federal Savings and Loan, un grand bâtiment moderne, ouvrait à peu près au même moment pour quatre millions de dollars de comptes en banque en une semaine. Et ainsi est né un nouveau mantra: “Black Dollars Matter”, le dollar noir compte. Depuis, sur les réseaux sociaux, le #BankBlack – “banques noires” ou “banquez noir” – fait du chiffre. Puisque l’Amérique blanche les rejette, les Noirs américains ont décidé de se serrer les coudes. “D’investir dans leur propre communauté”, peut-on lire. Et cela passe par le fait d’enlever ses économies des coffres des grandes banques créées par des Blancs pour aller les réinvestir dans des banques historiquement noires, c’est-à-dire créées et dirigées par des Afro-Américains.
À Atlanta, où 54% de la population est noire, la Citizen Trust Bank a reçu 8 000 demandes d’ouverture de compte ces dernières semaines. Solange Knowles et les rappeurs Usher et Killer Mike ont fait part de leur décision de rejoindre le mouvement.