
Voilà treize heures que Moïse bat sèchement le pavé. La veille, aux alentours de minuit, un taxi l’a déposé tout près du Stade de France. Dans la pénombre, il a pu distinguer les contours de quelques silhouettes. Plus loin, des tentes éparses. Mais devant l’entrée de la porte Z, celle inscrite sur son billet, personne. Le jeune homme de 20 ans avait tout méthodiquement planifié, mais ne s’attendait pas à être le premier de la file. “Je pensais m’être trompé. J’ai même demandé confirmation à la sécurité, pour être sûr qu’il n’y avait que moi.” Sur le revers de sa main, un gardien a gravé le numéro 1 au feutre noir. “Il m’a dit que c’était unique.” Dans sa voix, les trémolos trahissent sa quiétude de façade. La nuit a été longue et froide. “Je n’ai pas réussi à dormir. J’ai enchaîné six épisodes de ma série sur Netflix assis sur une chaise pliable, couvert d’une doudoune. Vers 5h, avant que mes amis arrivent, mon moral était à zéro.” À l’aube, des premiers groupes ont rejoint les abords du stade au compte-gouttes, et ce vendredi 26 mai en début d’après-midi, ils continuent d’essaimer à un rythme de plus en plus soutenu: un bal flamboyant fait de robes à sequins, de santiags et de chapeaux de cow-boy flashy. Sous les couvertures de survie, les fans les plus matinaux portent tous le même t-shirt plastronné d’un seul visage: celui de Beyoncé.