Reportage

L’abandon de Kenosha

Kenosha ne devait être qu'un point sur une carte. Et puis, l'été dernier, un policier a abattu Jacob Blake, des émeutes ont éclaté et un suprémaciste blanc a ouvert le feu sur la foule. Aujourd'hui, on parle autant de Kenosha que si elle était la capitale des États-Unis.
  • Par Grégoire Belhoste, à Kenosha / Photos: Zen Lefort pour Society
  • 17 min.
  • Reportage
Une rue urbaine sous un épais brouillard, avec des bâtiments en briques de chaque côté et des voitures garées le long du trottoir. Un panneau sur un bâtiment indique "Vote for Change".
Photos : Zen Lefort pour Society

Dans les rues de Kenosha, il ne reste plus personne. Ni manifestants, ni miliciens, ni policiers, ni reporters de télévision. L’endroit est désert en cette matinée d’automne. Au milieu du brouillard, seul dans sa voiture, un homme de 70 ans écoute la radio. Cet homme, c’est Michael Schumacher. Voix d’ours: “Comme le pilote de Formule 1, sauf que je n’ai pas son argent.” Un titre de Simon an d Garfunkel s’échappe de l’habitacle, Schumacher monte le volume. La chanson s’appelle My Little Town, évocation de la ville d’enfance de l’un des deux chanteurs, où l’on n’est jamais guère plus que “le fils de son père” et où le mieux reste d’économiser son argent et de “rêver de gloire en tremblant comme un doigt sur la gâchette d’un fusil”. La rengaine pourrait tout aussi bien dépeindre Kenosha, à en croire Michael Schumacher. “Je viens d’une grande famille, j’ai sept frères et sœurs, mais tout le monde a quitté la ville. Peut-être à cause du climat qui y règne.” Un climat de guerre civile depuis que le 23 août dernier, aux alentours de 17h, un policier blanc a tiré sept coups de feu sur un Afro-Américain de 29 ans, Jacob Blake. C’était quelques semaines seulement après la mort de George Floyd à Minneapolis.

God Bless America

Society #143

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