
Premier bassin industriel européen et région métropolitaine la plus peuplée d’Allemagne avec cinq millions d’habitants, la Ruhr a subi de plein fouet la fermeture des aciéries et des mines de charbon ces dernières décennies. Ultime volet en date: l’arrêt de la dernière mine de houille du pays, à Bottrop, fin 2018. Aujourd’hui laissées à l’abandon et vidées de leurs ouvriers, les anciennes cathédrales de fer sont devenues les vestiges d’un temps révolu, mais qui a laissé des traces indélébiles sur les habitants de la région. À Dortmund, plus grande ville de la Ruhr en superficie et en population, 20% des résidents se sont ainsi retrouvés au chômage d’un coup, en 2005, après la fermeture de l’aciérie Hoesch. Si la ville parvient depuis à renaître de ses cendres et que le nombre de sans-emploi y a drastiquement diminué, elle fait figure d’exception dans le nord de la région, où certaines communes présentent des taux de chômage aux alentours de 30%. Autrefois l’une des villes les plus riches d’Allemagne, Duisbourg, la capitale de la “ceinture de la rouille”, recense quant à elle actuellement 12% de chômeurs, soit deux fois plus que la moyenne nationale. Conséquence inéluctable, ces villes connaissent alors un exode lent, mais certain, de leur population. C’est ce qu’explique le photographe allemand Daniel Chatard, qui a réalisé un travail de plusieurs mois le long de l’A40 : “À Duisbourg, plus de 100 000 personnes sont parties ces 30 dernières années.” En mars 2024, la chaîne de télévision régionale WDR révélait que de plus en plus de sans-abris de la ville d’Essen souffrent d’addiction à la drogue. En témoignent les seringues qui jonchent les trottoirs, et ce chiffre: 55 cas de décès par overdose pour l’année 2023, triste record pour la capitale de la Ruhr.