
C’est une salle de réunion improvisée. Un vieux canapé a été posé au milieu, des rangées de chaises dépareillées installées à la va-vite. Seule décoration dans la pièce principale de cette maison de San José, au Costa Rica: un drapeau blanc et bleu du Nicaragua, qui égaye l’un des murs jaune pâle sur lequel il a été accroché. La distribution de feuilletés aux lardons et de jus de fruits fait oublier l’accueil sommaire dans ce salon certes spatieux, mais trop petit pour contenir la soixantaine de personnes présentes. Ici, c’est un peu comme une grande famille. Tous les participants viennent du département de Masaya, dans le sud du Nicaragua, et ont fui la répression du régime de Daniel Ortega. Ce dimanche matin-là, ils sont rassemblés pour lancer leur mouvement, Articulation de Masaya en exil – Costa Rica. Un homme du nom d’Álvaro Antonio Gómez se dirige en claudiquant vers la table du salon, où trônent deux enceintes. Il pose sa canne en bois vernis, attrape un micro et commence son discours. “Il faut que l’on s’organise, même si on a des façons de penser différentes. Qu’est-ce que veut Ortega? Que l’on soit désorganisés. Et notre objectif, c’est de rentrer au Nicaragua”, lance-t-il. Lui qui a perdu une jambe dans les années 1980, alors qu’il se battait pour maintenir Daniel Ortega au pouvoir, considère aujourd’hui le président comme un “véritable traître. C’est lui qui a trahi les principes de la révolution de 1979. L’orteguisme s’est éloigné de l’idéologie sandiniste, c’est un mouvement qui lutte pour un capital économique et non plus pour une idéologie politique”. “El Profesor”, comme on le surnomme, a fui le Nicaragua au mois d’août, en passant par la montagne pour échapper aux patrouilles militaires.