
La particularité de notre usine, c’est qu’on s’y lave généralement les mains AVANT de faire pipi. C’est même une obligation. Et au savon de Marseille, de préférence. Ce qui a un jour valu à Jean-Baptiste Martin, le patron, des remontrances de la part des inspecteurs sanitaires venus contrôler sa fabrique de 1 000 mètres carrés dans le Loir-et-Cher. “Ils ont fait le tour des lieux, on a eu du vert partout, sauf pour le vestiaire du personnel. Ils m’ont dit : ‘Le savon en brique sur le lieu de travail, monsieur, c’est interdit. – Si vous voulez, mais je ne l’enlèverai pas. Vous êtes mignons avec vos liquides désinfectants, mais pour retirer les principes actifs, il faut de la soude, donc du savon de Marseille. Ce qui m’importe, c’est que mes employés n’aient pas le zizi en feu. À la décharge ” ‘ des fonctionnaires, l’homme en face d’eux, avec ses cheveux aux épaules et son look de hippie californien, est à la tête d’une manufacture d’un genre nouveau en France: il conçoit, fabrique, conditionne et commercialise des sauces piquantes haut de gamme à base de piments frais. “Je préfère le terme de ‘ hot sauces‘, parce que le piment brûle plus qu’il ne pique, en réalité”, précise-t-il. Avec son épouse, Anna, et son cousin, Benjamin, ils ont lancé la marque de sauces Martin il y a quatre ans, “en faisant all-in”. C’est un carton. L’hypothèque de la maison a été levée et la famille a déjà refusé les approches d’industriels ayant proposé de les racheter. La maison Martin écoule 500 000 bouteilles par an et affiche un taux de croissance annuel à trois chiffres. Sa hot sauce à la truffe à 13 balles a même trouvé sa place chez Lafayette Gourmet. “Aujourd’hui, c’est le banquier qui appelle pour savoir si on a besoin de quelque chose”, résume le chef d’entreprise.