
Mireille Dumas
“J’ai grandi à Vincennes, dans une famille d’intellos, où le matin, dans la cuisine, on n’écoutait pas la matinale, que ce soit celle d’Europe 1, de RTL ou de RMC. Mon père écoutait France Musique -ma mère trouvait que c’était trop fort–, et moi, je n’ai écouté que Nostalgie et Chérie FM toute mon adolescence. Donc quand j’ai commencé à faire de la radio moi-même, je n’avais aucune culture radio. Mes premières références d’interviews, c’est à la télé et c’est celles de Mireille Dumas. On l’a beaucoup accusée de voyeurisme, de déballage, mais je pense qu’on ne se rendait pas compte d’à quel point ses interviews étaient dignes et respectueuses, ni d’à quel point elles étaient d’utilité publique. Elles parlaient d’enjeux de société tabous qui n’étaient traités nulle part ailleurs, comme la prostitution ou la fin de vie. Je me rappelle voir tous les acteurs de quand j’étais gamine raconter sur le plateau leurs failles ou leur enfance déchirée, alors que c’était une génération qui ne s’autorisait pas à parler d’elle. Nos pères ne racontaient jamais ces choses-là. Mireille Dumas a été exceptionnelle.”
Philippe Labro
“Philippe Labro, je l’ai aussi découvert à la télévision, dans l’émission Ombre et Lumière . Ce ne sont pas tellement ses interviews en elles-mêmes qui m’ont marquée, mais la séquence des ‘pourquoi?’ . À la toute fin de chaque entretien, Philippe Labro donnait une dernière information, inattendue ou très bateau, au sujet de son invité(e), qu’il terminait en posant la question ‘Pourquoi?’. Puis la personne expliquait pourquoi elle avait fait ou dit telle chose. Et quand elle pensait être arrivée au bout de sa réponse, Philippe Labro la regardait, extrêmement calme, et relançait avec un ‘Oui, mais pourquoi?’ Et l’invité(e), un peu déstabilisé(e), refaisait une réponse, mais en étant obligé(e) de creuser plus loin. Parfois, Labro faisait faire quatre, cinq ou six ‘Pourquoi?’ d’affilée. J’ai des souvenirs d’invités qui finissent dans des moments de vérité extraordinaires, ça faisait des fins d’émission où on était suspendus. Peut-être qu’un jour je demanderai l’autorisation à Nagui, qui produisait Ombre et Lumière, de reprendre ce gimmick.”