L'INTERRO-NÉGATIVE

Fary : « On me dit tout le temps que je ressemble à Nicolas Batum, ça me met hors de moi »

Dans la vie, Fary est artiste. Après un passage dans On n'demande qu'à en rire, puis au Jamel Comedy Club, il répand calmement son spectacle depuis plusieurs mois dans des salles parisiennes de plus en plus grandes.

Il va bien. Mieux. Il va bien mieux, parce qu’il le faut. « J’ai été en deuil pendant deux, trois jours mais après, tu penses aux familles des victimes, aux rescapés et tu relèves la tête. » Lui n’a pas été touché directement, mais quand même. Une semaine après les attentats, il devait faire des blagues sur la scène du Bataclan. Trois dates. Qu’il attendait avec impatience depuis des mois. “Je vivais Bataclan, je mangeais Bataclan, je dormais Bataclan.”
Fary a 24 ans, des cheveux qu’il affectionne particulièrement et, devant lui, une assiette où deux tranches de bacon grillé recouvrent quatre œufs au plat, pour accompagner son orange pressée. Un petit déjeuner comme un autre. À 18h.
La scène, il la côtoie depuis longtemps: à 11 ans, il fait son premier one man show grâce à son oncle qui organise des soirées trimestrielles pour les enfants et trouve qu’il imite parfaitement bien Jamel dans son sketch sur une arrestation au Maroc (« Les mains du l’air »). Mais c’est au lycée – Marcelin-Berthelot, à Saint-Maur-des-Fossés dans le Val-de-Marne– que tout prend vraiment un sens. Lors de sa deuxième seconde, il se découvre un amour pour l’histoire et un avenir dans l’humour grâce à une prof, Jessie Troja, qui le pousse à faire de sa répartie un métier en l’aidant à écrire un spectacle et en lui achetant des accessoires. « Comme une deuxième maman. C’est d’ailleurs assez rare dans l’Éducation nationale, les gens qui t’aident à faire ce que tu sais faire.”
Il ne la voit plus trop. Il ne voit « même plus trop [s]on petit frère alors [qu’ils habitent] dans la même maison“. La réalisation de son rêve, celui d’être artiste, prend désormais trop de place. Trop de temps. Depuis deux ans, il est un peu partout. Sur les plateaux télé, dans des émissions de radio et des vidéos YouTube, dans Océane de Philippe Appietto et Nathalie Sauvegrain ou encore dans On n’demande qu’à en rire sur France 2. Et c’est désormais avec Jason Brokerss, du Jamel Comedy Club, qu’il écrit. Le Jamel Comedy Club, il ne voulait pas y passer, à la base : “Je suis un mec de banlieue mais je ne voulais pas être cantonné à un mec de banlieue, je préférais me mettre à part. » Et puis, de fil en aiguille… Il gagne un prix au festival L’Humour en capitales et joue son spectacle « devant six personnes” au Paname. C’est là qu’il rencontre Kader Aoun, dont il est “un grand fan” depuis qu’il l’a “découvert dans les bonus du DVD de Jamel”. L’homme derrière l’humour français l’intègre d’abord à son projet Adopte un comique “avec Hugo tout seul, Camille Combal, David Bosteli, Tom Villa…” puis le convainc d’intégrer la troupe de Jamel. Fary fait mouche en taclant le legging en sarouel. Les six personnes du Paname sont devenues 115 au Point-Virgule et seront près de 900 ce week-end à Bobino. Parce que c’est dans les moments compliqués “que le métier d’humoriste est le plus important ».

Qu’est-ce que tu n’es pas ?

Un clown. Je ne suis pas le mec drôle du groupe. Je suis celui qui observe.

Qu’est-ce que tu n’as pas ?

Des pecs. Mais j’en aurai bientôt.

Qu’est-ce qui ne te manque pas ?

Je ne manque pas d’amour.

Qu’est-ce que tu ne comprends pas ?

Les gens fermés d’esprit.

Quel sport n’as-tu jamais pratiqué ?

Le patinage artistique. Je suis pas à mon avantage dans un collant.

En quoi est-ce que tu ne crois pas ?

J’ai beaucoup de mal à croire à la fidélité. Parce que je ne l’ai jamais été. Je n’ai jamais su l’être.

À qui/quoi tes lunettes ne te font pas ressembler ?

À Nicolas Batum. On me dit tout le temps que je lui ressemble, ça me met hors de moi. Je déteste ressembler à qui que ce soit.

À quelle heure ne doit-on pas t’appeler ?

À midi. Je dors.

Quel métier ne voulais-tu pas faire quand tu étais petit ?

Un travail dans un bureau.

Quel acteur ne jouera pas ton rôle dans ton biopic ?

Omar Sy. Parce qu’il est beaucoup trop noir.

Qu’est-ce que tu ne veux pas savoir ?

Je n’ai pas envie de connaître mon avenir. Je considère que tout est possible. Et savoir ce qu’il va se passer, ça enlève toute notion de destin.

Qu’est-ce que la vie ne t’a pas appris ?

À être dur. Dans le sens insensible, fort.

Qu’est-ce que tu fais pour ne pas sauver la planète ?

Je prends des douches de quinze minutes.

Quel est le dernier film que tu n’es pas allé voir ?

Certainement un film français. Le cinéma français, c’est très rare qu’il me fasse me déplacer dans une salle de cinéma.

Qu’est-ce qui ne te fait pas rire ?

La moquerie.

Quel cadeau ne faut-il pas t’offrir à Noël ?

Des vêtements. On se trompera forcément.

Pour qui n’as-tu pas voté à la dernière élection présidentielle ?

François Bayrou. Voilà, comme ça, je me mouille pas.

Avec quel artiste n’as-tu pas du tout envie de faire un duo ?

Jamel Debbouze. Parce qu’il est beaucoup trop drôle pour moi.

À quoi est-ce que tu ne penses pas là tout de suite ?

À autre chose.

Quel média ne t’a pas encore interviewé ?

Les Inrocks. Peut-être qu’ils sont intimidés par moi. Ou alors, je suis pas assez hype pour eux. Ou trop.

De quoi ne parles-tu pas dans tes sketchs ?

D’IKEA. J’ai absolument rien à raconter sur IKEA.

Qui ne cites-tu pas dans tes sketchs ?

Ma grand-mère. Pourtant, elle me fait beaucoup rire. En général, quand t’as des personnages dans tes spectacles, tu t’inspires de ceux qui sont drôles malgré eux. Ma grand-mère n’est pas drôle malgré elle, c’est une vanneuse.

Qu’est-ce que tu ne fais pas après ton spectacle ?

Je ne rentre pas me coucher.

Pourquoi ne faut-il pas aller voir ton spectacle ?

Si tu ne veux pas rire. Si tu ne veux pas rire, il faut pas venir voir mon spectacle.

 

Voir : Fary au Point-Virgule jusqu’au 2 janvier (COMPLET), Fary à Bobino les 27, 28 et 29 novembre (en remplacement du Bataclan), Fary au Grand Point-Virgule à partir du 13 janvier (du mercredi au samedi à 21h30)

Par Noémie Pennacino / Photo : Hélène Pambrun