
Pourquoi avoir choisi les clowns d’hôpital comme sujet de ton premier film, Sur un fil ? Mon père était acteur de théâtre et ma mère infirmière. J’ai grandi entre coulisses de théâtre et couloirs d’hôpitaux. J’ai retrouvé une photo de moi à 8 ans, avec un nez rouge pour chanter Ah! Les crocodiles à l’arbre de Noël du service où travaillait ma mère. En général, je suis attiré par les formes artistiques qui ont une valeur thérapeutique, comme la musique gnaoua, jouée par les anciens esclaves au Maroc, qui se pratique toute la nuit, avec des transes… J’ai retrouvé cette notion de rituel dans la chambre d’hôpital, où il y a plus d’acteurs que de spectateurs. Il n’y a pas de caméras, pas d’applaudissements, c’est un moment qui n’a une valeur que pour ces gens dans cette chambre d’hôpital. J’y vois une essence pure du geste artistique, qui ne sert pas à en placer certains en haut et d’autres en bas.
Tu as été clown toi aussi, non? Oui, mais pas d’hôpital. Clown d’appoint, clown de survie, quoi. Je faisais des anniversaires, j’étais animateur plus qu’autre chose. Dans ma valise, j’avais clown, cow-boy, pirate, et je faisais en fonction de ce que les enfants demandaient. J’ai commencé les petits boulots quand j’avais 17 ans et que je préparais le bac. J’ai bossé pendant trois ou quatre ans dans un cinéma à Ivry-sur-Seine qui s’appelle Le Luxy, en faisant caissier, ouvreur, avec la petite lampe de poche pour entrer dans la salle et les tickets qu’on déchire. Puis j’ai fait une petite formation pour être projectionniste. J’ai fait quelques conneries, comme inviter des potes au cinéma pour la sortie de Pulp Fiction , à fumer dans la salle… J’étais très insouciant parce que j’avais confiance dans le fait que ça finirait par marcher pour moi en tant qu’acteur, et parce que si je perdais un boulot, j’en trouvais un autre dans la foulée.