“Voyager lorsqu’on a un handicap moteur et une mobilité réduite, c’est parfois le parcours du combattant.” Tout est parti de là. À l’été 2016, Mélina et son frère, Emmanuel, réfléchissent à leurs vacances et jettent leur dévolu sur la Grèce. Jusque-là, rien d’extraordinaire. Mais les préparatifs se compliquent pour Mélina, atteinte d’une myopathie qui l’oblige à se déplacer en fauteuil roulant. “On s’est rendu compte qu’obtenir des informations fiables sur l’accessibilité était très compliqué, explique la jeune femme. Que ce soit sur les plages, les monuments, les chambres d’hôtel, les restaurants et même les toilettes.”
Heureusement pour Mélina, son père, d’origine grecque, est alors sur place pour se rendre dans les mairies. Mais souvent, les quelques informations obtenues sont inexactes. “Pour les plages avec rampes et matériels de mise à l’eau, par exemple, il était écrit que l’équipement devait être mis en place au début de la saison, c’est-à-dire en avril. Or, on est partis en juin et rien n’était installé…”
Ça n’a pour autant pas découragé Mélina, qui est quand même partie. Mais d’autres abandonnent. Le manque d’information sur l’accessibilité est tel que l’on estime à 80% la part des personnes à mobilité réduite qui renoncent à leurs voyages. Dernier essai de Mélina: une agence spécialisée qui propose des formules pour personnes à mobilité réduite. Hélas, une fois encore, c’est un échec. Le package est hors de prix et loin d’être garanti à 100% puisque Mélina se retrouve dans un hôtel à Rome supposé être accessible, et finalement en travaux. “Il nous paraissait évident que le surcoût n’en valait pas la peine et que l’on était mieux servis par nous-mêmes”.
Plus de 2 000 adhésions
Et là, c’est le déclic. Mélina et Emmanuel imaginent une plateforme sur laquelle des personnes à mobilité réduite pourraient raconter leurs voyages afin de motiver les autres à faire de même. Six mois après la Grèce, Handiplanet voit le jour. Ce guide de voyage collaboratif made in Nantes couvre plus de quinze pays et rassemble toutes les informations pratiques, bons plans et astuces, publiés par les “handivoyageurs”, inscrits gratuitement sur le site. “L’accessibilité est notée d’une à cinq étoiles. Le nombre détermine le degré d’accessibilité et son appréciation se fait en fonction du degré de mobilité de chacun. Les utilisateurs peuvent aussi ajouter un commentaire et des photos, précise Mélina. Si toutefois un voyageur souhaite de plus amples renseignements, il peut entrer en contact avec les handivoyageurs qui ont évalué les lieux.” Handiplanet devient alors une vraie communauté où, tout comme sur les réseaux sociaux, les inscrits peuvent devenirs amis.
Après deux semaines d’existence, la plateforme compte déjà plus d’une centaine d’adhérents. “Ça plaisait tellement que l’on a décidé d’améliorer la première version.” Mélina et Emmanuel –qui depuis travaillent à plein temps sur ce projet– lancent alors un crowfunding et réunissent 12 000 euros, de quoi publier les nouveautés en février dernier. Au menu: plusieurs langues disponibles, un design amélioré et plus d’engagement. Des changements qui ont porté leurs fruits puisque aujourd’hui, Handiplanet compte plus de 2 000 adhésions. Mais le combat n’est pas terminé et la jeune femme continue sa quête de soutiens. “On est en relation avec l’APF et l’APAJH 44 (Association pour adultes et jeunes handicapés de Loire-Atlantique, ndlr), mais aussi avec des blogueurs spécialisés dans l’handivoyage, avec la société de transport Titi Floris, et nous sommes soutenus par M. Pozzo di Borgo, qui a inspiré le film Intouchables”, explique-t-elle. Dernier objectif en date: faire d’Handiplanet une application smartphone afin que leur devise devienne une bonne fois pour toute réalité: “Un monde accessible pour tous”.
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